Lettre ouverte à mon ami Laurent Joffrin

(Texte initialement publié sur Posterous)

Évacuons ça tout de de suite : Laurent Joffrin n'est pas mon ami. Je ne l'ai jamais rencontré. Mais comme Myriam (qui, elle, est vraiment mon amie) préfère le vouvoyer, je me suis dit que ce serait sympa de prendre le contre-pied.

Donc, cher Laurent, je vais te tutoyer, et même faire semblant d'être ton pote. Ne t'inquiète pas, c'est uniquement pour les besoins de la cause. J'arrête tout de suite après.

Passons aux choses sérieuses, si tu veux bien. J'ai lu ton papier d'hier sur les “inspirateurs” de Breivik. Bon, on sent bien que tu l'as écrit sous le coup de l'émotion : le style est un peu trop mécanique pour être naturel (même pour toi). C'est généralement le signe d'une grande nervosité chez l'auteur.
Faut pas s'énerver comme ça, Laurent. Regarde ce que tu as fait : tu t'es débrouillé pour mettre dans le même sac l'auteur d'un massacre de presque 100 personnes et des guignols comme Fdesouche, le Bloc identitaire et Riposte laïque. C'est vraiment pas classe.

Tu te souviens à quel point ça t'énerve quand Rioufol accuse les “islamo-gauchistes” dans ton genre d'apporter leur pierre à l'édifice du terrorisme “nazislamiste” ? Et bien tu viens de faire exactement pareil. Ni plus, ni moins.

Ensuite, ton paragraphe sur le lien avec Internet, on n'y comprend rien. Enfin si, on comprend. On comprend que tu sais plus trop quoi en penser. D'un côté tu sens bien que c'est quand même révolutionnaire, Internet (si même Martine Aubry a fini par le dire, c'est que ça doit être vrai). Mais en même temps ça te fait peur : sur Facebook, Twitter, les blogs, pas de comité de rédaction, pas de directeur de la publication, juste des gens qui écrivent tout et n'importe quoi. Un peu comme si, du jour au lendemain, tous les dingues du courrier des lecteurs pouvaient faire concurrence à ton petit Nouvel obs à toi - et sans ta permission, en plus !

Toi, si tu te lâches un peu trop sur le président ou un ministre, tu reçois un coup de fil dans l'heure qui suit, et t'es obligé de t'excuser plus ou moins platement, en expliquant que non, tu n'étais pas dans l'attaque personnelle, simplement dans l'analyse journaliste, patin couffin. Les blogueurs, eux, ils écrivent tout ce qu'ils veulent, c'est retweeté dans tous les sens, et personne ne leur cherche de noises ! Au contraire, on dit même qu'ils font le “buzz” !

Je comprends que tu subisses ça comme une concurrence déloyale. Mais n'oublie pas : nous, les blogueurs, on fait ça pour s'amuser. Toi, c'est ton métier de donner ton avis. C'est un beau métier, je trouve. Et t'es pas près de le perdre : suffit juste que tu lâches un peu de lest sur tes angoisses numériques, et tout d'un coup tu vas découvrir tout un monde d'opportunités.
Bon, allez, je te laisse. C'est pas tout ça, mais il faut aussi que je m'occupe de Jacques. Avec lui, c'est encore plus difficile : il croit qu'il aime vraiment Internet.
Bisou.

P.S. : Que Fdesouche fasse autant d'audience que certains partis politiques, c'est plus révélateur sur les partis en question que sur ce repaire à trolls à la con.

 
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